"La grande politique, le gouvernement de la terre sont tout proches
des guerres terribles pour la souveraineté planétaire se feront
au nom de doctrines philosophiques fondamentales"
Nietzsche
C'est un comble ! Au moment où l'Europe fait appel au suffrage de ses citoyens en une élection capitale et historique, au moment où, comme en 40, elle est menacée dans sa substance par un pouvoir tyrannique et où elle tente de se constituer en Puissance, dans tous les pays de l'Union, ce sont les partis fascisants, nationalistes, europhobes et xénophobes qui, profitant de la vague populiste, vont probablement l'emporter avant de s'employer à détricoter, à miner les projets vitaux d'une Europe confrontée à une crise environnementale sans précédent et à la guerre et qui devra défendre les droits humains en période de réchauffement climatique où l'instabilité migratoire va devenir dominante et problématique ...
Tous les candidats font sans doute une place dans leur programme à un volet écologique, la revendication est transversale à tous les projets et nul ne peut la revendiquer pour soi seul. Mais en disant par exemple comme Bardella ou Bellamy : "oui à l'écologie mais pas d'écologie punitive !" qu'est-ce que cela peut signifier au moment où, en Inde, au mois des mai, les singes en surchauffe tombent, inanimés, des arbres et où en est à deux doigts des points de bascule qui vont rendre la planète inhabitable, Gaïa ne pouvant plus se soigner elle-même ? Imagine-t-on que les mesures écologiques pourraient constituer un chemin de rose ? L'urgence climatique est telle que le chemin de la réduction du co2, condition de la limitation de la température du globe, ne peut être qu'extrêmement contraignant, ne peut exiger de nous qu’une révolution globale aussi considérable que l'a été la révolution industrielle, avec cette petite différence qu'elle ne nous apportera aucun “plus” et que nous, les adeptes jouisseurs de la religion du bien-être et de la consommation sans frein, devrons renoncer drastiquement à un confort qui nous soumet aveuglément à des modes de vie si destructeurs. "Confort est crime m'a dit la source en son rocher !", écrivait le résistant René Char...Mais il est clair que les sacrifices auxquels il nous faudra bien consentir devront être justement répartis entre les classes sociales et que seule une Europe passée à gauche pourrait effectivement réaliser un tel programme : pas d'écologie qui ne comporterait pas un volet social !
L'hymne à l'Europe est écrit à la gloire de la liberté, de laFreiheit (et non de la Freude) comme le disait initialement, dans la langue de l'Allemand avec lequel nous nous sommes réconciliés, le poème de Schiller. Nous sommes nés sur une terre qui, dans ses plus hauts moments, a toujours refusé toutes les formes de servitude et si les hommes ont fait de grandes choses ce n'est que lorsqu’ils se sontbattus et ont donné leur vie non pour la conquête d'un territoire ou d'un profit économique quelconque mais pour conquérir leur liberté ou rester libres. Sans parler de la saignée considérables des 20 millions de soviétiques, les GI qui sont tombés à Omaha beach étaient en terre étrangère, ils sont morts, comme les résistants qui ont disparu dans les Lager, pour mettre à bas le fascisme et libérer l'Europe de l'idéologie infâme qui déshonore notre espèce. Après la peste brune douloureusement surmontée, le mur de Berlin a fini par tomber et l'Europe a pu s'affirmer et se constituer contre le totalitarisme, qu'il soit brun ou rouge. Cette Europe démocratique est aujourd'hui menacée par l'agression coloniale de Poutine, le tueur de Navalny, qui redoute par dessus tout, depuis les manifestations de Maïdan, que l'Ukraine prenne le goût de la liberté et instaure un Etat de droit. En Europe comme en Afrique, il cherche à nous déstabiliser, à pourrir notre réputation par le poison de la désinformation, à faire de nous des bêtes maladives en ciblant, parmi toutes nos passions tristes, l'affect dépressif de la peur. L'alliance de la Russie est maintenant scellée avec la Chine et les pays du Sud global qui n’ont pas comme nous la mémoire de la shoah mais plutôt celle de la colonisation (ainsi, pour la Chine, revanche sera prise sur l’humiliation infligée par l’Occident lors de la guerre de l’opium). L'accord est acté pour en finir avec l'hégémonie occidentale, déstabiliser les démocraties, favoriser les dictatures, en treillis, de préférence. Demain, profitant des élections américaines, Pékin pourrait mettre militairement la main sur Taïwan comme il vient de le faire sur le "système" démocratique de Hong Kong sans que personne ne lève le petit doigt. Ces ennemis de l'extérieur ont besoin d'une cinquième colonne pour triompher ; l'extrême droite qui a trahi nos valeurs, est chez nous, n'en doutons pas, l'ennemi de l'intérieur qui est en train de se constituer et de leur prêter main forte. L'heure de la grande politique « au nom de doctrines philosophiques fondamentales », a désormais sonné.
FW